Galilée et Antoine de Ville : un courrier sur l’idée de matière

Hélène Vérin

Centre Alexandre Koyré

Paris. France.

 

Le 17 février 1635, Fulgenzio Micanzio qui a reçu les premiers feuillets du Discours sur deux sciences nouvelles annonce à Galilée qu’il se propose de les faire lire à Antoine de Ville, un ingénieur au service de Venise, réputé, précise-t-il, pour être grand mathématicien et expert en mécanique. Il était en outre grand admirateur des idées de Galilée. Entre cette date et le 26 mai Micanzio, mais aussi Paolo Aproino, vont évoquer non sans embarras, dans plusieurs courriers à Galilée, les réticences manifestées et les objections soutenues par A. de Ville. Celui-ci, dans une longue lettre datée du 3 mars 1635, les expose à Galilée qui lui répond. Malheureusement, cette réponse qui n’est pas datée ne nous est pas parvenue dans son entier et nous n’avons que les réactions de Galilée au premier point abordé par Ville: celui de la machine qui, réussissant en petit ne réussit pas en grand.

Je propose d’examiner ces correspondances comme des témoignages de la difficulté que peut avoir un ingénieur prestigieux, mathématicien reconnu, à adhérer à l’effort de conceptualisation auquel se livre Galilée, tout particulièrement en ce qui concerne l’idée abstraite de matière. Micanzio et Aproino, pour expliquer les réticences de Ville parlent de naïveté. Or les critiques de Ville sur d’autres points de la première journée sont tout sauf " naïves ".

Analyser les motifs et les raisons de l’incompréhension manifeste de Ville peut être le moyen d’apporter quelques lumières sur ce qui sépare alors la mécanique mathématique de cet ingénieur, de la physique mathématique que Galilée s’efforce de mettre en œuvre et de déterminer.

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