Urbain VIII protagoniste de la condamnation de Galilée

Francesco Beretta

Université de Fribourg

Suisse

 

La sentence de condamnation de Galilée, le 22 juin 1633, a été signée par les cardinaux inquisiteurs, lors de la séance ordinaire de la Congrégation du Saint-Office du mercredi, au cours de laquelle le philosophe a abjuré. Mais le verdict de condamnation a été prononcé par Urbain VIII Barberini en personne, le 16 juin, lors de la séance ordinaire de la Congrégation du jeudi, que le Souverain Pontife a présidée en sa qualité de juge suprême en matière de foi. Ce fait, interprété à la lumière du style du Saint-Office romain, permet d'affirmer que c'est le pape lui-même qui a condamné Galilée à abjurer le système du monde copernicien comme contraire à la foi. De plus, Urbain VIII a voulu donner une valeur particulière à cette condamnation en ordonnant à deux reprises, le 16 et le 30 juin, que la sentence et l'abjuration de Galilée soient portées à la connaissance des mathématiciens et des philosophes de la Chrétienté entière, puis en s'assurant, au cours de l'été 1633, de l'exécution de ses ordres.

Cette condamnation étonne si l'on songe aux relations cordiales qu'entretenaient auparavant les deux toscans, Maffeo Barberini et Galileo Galilei. C'est ce climat favorable qui explique l'imprimatur obtenu par le philosophe, en 1630, pour son Dialogue sur les deux plus grands systèmes du monde, publié à Florence en 1632. Or, il est hors de doute que cette publication va tout changer, car comment expliquer, aux yeux des contemporains, le permis d'imprimer donné par les autorités inquisitoriales suprêmes à un livre qui est en contradiction patente avec le décret de l'Index du 5 mars 1616 condamnant les ouvrages coperniciens?

La publication du Dialogue de Galilée survient à l'époque d'une mise en question, par le parti espagnol, de la politique européenne d'Urbain VIII, jugée trop faible face aux puissances protestantes, et qui culmine avec le célèbre consistoire du 8 mars 1632, au cours duquel le Cardinal Borgia essaie de remettre une protestation officielle au Souverain Pontife. Lorsque le nouveau livre de Galilée arrive à Rome, dès mai 1632, la surprise est grande : le pape Barberini aurait-il approuvé la publication d’un ouvrage qui s’efforce d’apporter la preuve du mouvement de la terre et qui met ainsi en question l'interprétation géocentrique, et catholique, de l’Écriture Sainte? Urbain VIII serait-il donc également dans le domaine culturel, comme il l’est dans le domaine politique, trop faible face à l’hérésie?

Le procès du philosophe toscan — dont l'exposé présentera les principaux aspects judiciaires et doctrinaux — s'insère dans ce contexte, marqué par une épuration des milieux proches du pape, et en particulier du Saint-Office. Sont alors écartées, pour être remplacées par quelques créatures du système clientéliste des Barberini, des membres du parti espagnol, ou des personnes jugées peu fiables. La condamnation de Galilée à l'abjuration apparaît ainsi comme une éclatante manifestation de la catholicité du Souverain Pontife, défenseur de la vraie foi, au moment même où est inauguré le baldaquin du Bernin, dans la Basilique de Saint Pierre, arc de triomphe du pape Barberini, et où est reçu en grande pompe le Maréchal de Créquy, ambassadeur du Très Chrétien.

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